« La question d’une réforme de la peinture à l’encre traditionnelle a été soulevée dès l’époque de la République de Chine au siècle dernier. C’est un vieux problème qui n’a jamais été complètement résolu. On peut même dire que ces cent dernières années, le champ artistique n’a pas cessé d’essayer de faire coïncider la tradition millénaire de la peinture à l’encre avec l’esthétique actuelle. »
- Chen Yingjie
Les murs de la galerie Danysz à Shanghai vibrent d’énergie avec cette nouvelle exposition solo par Chen Yingjie. L’artiste cantonais continue de développer un style hybride très personnel, une fusion saisissante entre graffiti et peinture de paysage à la chinoise. Les toiles présentées ici, issues de sa célèbre série Gravity, marquent le dernier jalon d’un cheminement artistique qui déconstruit les genres.
La série Gravity est profondément ancrée dans la peinture à l’encre de Chine. Adoptant une approche contemporaine du travail des grands maîtres de la tradition chinoise, il utilise une gamme variée de techniques non-conventionnelles, tout en restant fidèle à l’esprit, à la force et la vitalité de la peinture à l’encre. « La culture chinoise traditionnelle, dit-il, a un impact significatif sur ma création. On peut y sentir ce qi dynamique et invisible circuler autour de mes œuvres. On peut aussi y percevoir le souffle et le combat de la vie, le pouvoir de la nature, et la relation sévèrement déséquilibrée qui existe à présent entre l’Homme et la nature. »
La nature est partout dans l’œuvre de Chen Yingjie. Initiée en 2020, la série Gravity fait suite à cette prise de conscience par l’artiste que la pandémie que nous vivons a eu un certain nombre de retombées bénéfiques sur l’écologie, et que le ralentissement de l’activité économique à l’échelle mondiale a conduit à une convalescence, voire même une forme de renaissance pour l’environnement. Les toiles de cette exposition, avec toute leur explosivité abstraite, sont une ode aux forces de la nature. Elles peuvent être lues comme des paysages imaginaires où le regardeur est invité à une attitude respectueuse, et où l’esprit est libre de s’égarer, captivé par la vivacité des couleurs et l’impression de mouvement qui se dégage des œuvres.
Peintre, Chen est aussi un peu showman. Sa façon de travailler est éminemment gestuelle. A la manière d’un Jackson Pollock, il entre dans un rapport physique avec la toile, à grand renfort de mouvements dynamiques et d’éclaboussures. Parmi ses autres outils on peut citer la bombe aérosol et la peinture acrylique. Un arsenal mixte, mélangeant street art et expressionnisme abstrait, pour un style qui défie toutes catégories. Pendant tout l’été, les aficionados de l’art à Shanghai vont pouvoir se régaler de l’un des talents les plus doués et les plus inclassables de sa génération.
