ARTICLE PARU DANS THE MAGZ
(magazine d'art trimestriel papier destiné aux amateurs d'art et publié en anglais, français et chinois)
Publié en Avril 2016
APRES AVOIR PRIS D'ASSAUT COVENT GARDEN AVEC 100 000 BALLONS CHARLES PETILLON VOYAGE
Né en 1973 à Paris, Charles Pétillon découvre la photographie dès l’âge de 11 ans. Ce n’est cependant que plusieurs années plus tard, qu’il va se consacrer pleinement à cet art. A partir de 2002, Charles Pétillon va rapidement développer sa propre sensibilité basant, au cœur de ses recherches esthétiques, une idée de la beauté qui serait présente dans la simplicité et les détails. Sous son œil, le beau semble s’extraire de chaque objet et de chaque lumière, au sein de la nature comme des constructions humaines. Très influencé par le Land Art, ses photographies seront la parfaite alliance entre objets et constructions humaines et paysages naturels.
Ce travail de recherche esthétique se couple dès lors avec une action de mise en œuvre et de mise en scène de ses photographies, qui sont créées selon un protocole précis, à partir d’installations complexes que le résultat final tend à cacher. Il tire son inspiration auprès d’autres formes d’art, comme le cinéma d’où il puise le cadrage et la mise en scène. Mais également la musique, qui, en étant intégrée dans le processus de création de la photographie, lui confère une atmosphère onirique et invite au voyage.
Si un élément devait être retenu pour décrire les photographies de Charles Pétillon, c’est bien les ballons qui envahissent ses images. Dans chacune de ses photographies, ces ballons sont attachés ensemble, par dizaines, centaines et même parfois milliers, illuminés par des pieds de lumière. Ces installations, complexes et immenses, qui peuvent atteindre jusqu’à 6 mètres de hauteur, sont le résultat de nombreuses d’heures de réflexion, de perception, et de conception. Ces ballons nécessitent plusieurs heures de gonflage, et d’installation, et correspondent à l’élément principal de l’image. Ainsi, la photographie finale repose sur un très long processus, qui s’étend sur plusieurs étapes jusqu’à ce que la scène finale soit en accord avec ce que Charles Pétillon souhaitaite et que la prise de vue finale soit effectuée.
Rien n’est laissé au hasard. Dans son processus de création photographique, l’improvisation n’a pas sa place : chaque détail, couleur ou texture est envisagée, calculée, travaillée, dans une volonté d’harmonisation de l’ensemble. Et si le résultat est tel, une fois sur le support, c’est bien parce que ses photographies personnelles répondent de la même rigueur que les commandes publicitaires qui lui sont passées.
Chaque photographie résulte d’un processus long. Ce ne sont guère plus de simples images capturées instantanément par l’appareil photographique, mais bien des installations que le photographe met en place, dans le but d’obtenir une scène où chaque élément participe de l’ensemble. Le procédé créatif se développe au cours de plusieurs étapes d’imagination de l’image, de repérages des lieux, de demandes d’autorisation si besoin est. Il dépend de contraintes matérielles et surtout météorologiques, car la lumière prend une place essentielle dans ses photographies, qu’elle soit naturelle ou artificielle, comme celle qui émane des pieds de lumière qui retiennent et maintiennent les ballons ensembles.
Dans les photographies de Charles Pétillon, il existe une relation double au temps. Il paraît à la fois suspendu dans le simple acte photographique qui fige la scène. Il est également en mouvement, s’étirant par la présence de ces ballons qui envahissent l’espace, alors que le temps passe. Même l’acte photographique, qui permet de figer l’image ne semble plus pouvoir arrêter la course du temps. La scène reste la même, les constructions humaines demeurent et malgré le temps qui passe, celles-ci semblent inchangées, comme immortelles et intemporelles.
Métaphores qui ne sont pas sans rappeler l’absurde, les photographies de Charles Pétillon sont des énigmes visuelles sur l’homme et son empreinte sur son environnement. Chaque objet apparaît comme un indice que le photographe va laisser pour guider le lecteur dans sa réflexion. Charles Pétillon le dit lui-même « C’est notre regard que j’essaye de rénover, d’aviver, permettant ainsi de passer d’une perception pratique à une expérience esthétique, une émotion visuelle ». C’est l’idée, dans cette série de photographies, de faire oublier les images elles-mêmes, leur composition et mises en scènes, pour amener vers un ailleurs de l’ordre du sensoriel. Il invite chacun à oublier un instant la création de l’œuvre, pour ne plus voir que l’œuvre. Il s’agit d’une image d’un monde qu’il imagine, et dont il offre à chacun la possibilité de s’y plonger. C’est une recherche esthétique, qui dépasse le cercle même de la réalité, afin d’emmener le spectateur à entamer une réflexion universelle sur l’homme et sur soi. C’est une invitation à se détacher des objets physiques ou matériaux, pour laisser son esprit voguer vers d’autres contrées, où le sensible, l’onirisme et l’esthétique sont les paysages principaux.