« Pour moi, une œuvre d’art doit avant tout être une question. » – Mark Jenkins
Quatre ans après sa première exposition personnelle à la galerie, Mark Jenkins est de retour du 3 décembre 2022 au 14 janvier 2023 avec « Outsiders » chez Danysz Paris – Marais. L’artiste américain nous invite dans son univers peuplé de personnages d’un réalisme saisissant : des œuvres qui interpellent, intriguent et suscitent toujours de vives réactions. En effet les installations hyperréalistes de Jenkins ont cette capacité à semer le doute entre fiction et réalité à travers l’interaction entre son art et le public, essence du travail de l’artiste.
A travers l'exposition « Outsiders », Jenkins donne corps à ses sculptures dont l’attitude et le mouvement ne cessent de surprendre par leur humanisation plus vraie que nature, brisant ainsi la monotonie de la vie quotidienne. Il nous présente ses sculptures insolites à l’origine de sa renommée internationale : des silhouettes grandeur nature camouflées sous leurs capuches, qu’il vêt de tenues ordinaires. Assis, debout, allongés, suspendus, ces personnages sont au centre de scènes percutantes se déroulant au sein de l’espace parisien de la galerie Danysz.
C’est au début des années 2000, que Jenkins se consacre à la réalisation de ces sculptures humaines réalistes qu’il installe dans l’espace public. Des figures anonymes d’hommes et de femmes souvent solitaires, placées dans des endroits ou des postures insolites qui captent inévitablement l’attention. Elles semblent raconter leur différence, leur absence d’appartenance à un groupe et leur difficulté à trouver leur place dans notre société. Si ces personnages s’intègrent à notre environnement quotidien, c’est en fait pour mieux s’en démarquer en s’adonnant à des activités où l’absurde se dispute à l’humour noir. Des rituels décalés qui détournent les normes et subvertissent nos codes habituels au grand jour et à la vue de tou.te.s.
« Je crée avant tout une expérience sociale. Je pourrais être un sociologue. Je pense que j’explore quelque chose qui se situe au-delà de l'art. C’est une autre expérience. » – Mark Jenkins
L’espace public joue un rôle majeur dans le travail de Mark Jenkins. C’est là que ses œuvres entrent en interaction avec les passants, transformant la rue en une scène qui fait d’eux non seulement des spectateurs mais aussi des acteurs. Dans ce théâtre urbain, les réactions des gens constituent autant d’objets d’étude et d’expériences que l’artiste se plaît à mener. Il s’agit pour lui d’introduire dans l’espace (qu’il s’agisse de la rue, d’une galerie ou d’un musée) un corps étranger, au sens propre comme figuré, pour mieux scruter en retour la réaction du corps social à cet élément perturbateur.
On pourrait se contenter de voir dans les personnages de Mark Jenkins des anticonformistes ou des asociaux, des « losers ». Il faudrait plutôt les considérer comme des « outsiders » capables de créer la surprise et qu’il faudrait prendre en compte. Tout est question de point de vue et du sens qu’on veut bien donner au mot réussite. Au bout du compte et malgré les apparences, ce sont peut-être ces « outsiders » qui pourraient être les vrais gagnants de ce que les anglosaxons nomment « rat race » (course de rats), une métaphore de la compétition acharnée à laquelle se livre l’homme moderne.
Ces outsiders, aussi étrangers qu’étranges, sont des témoins muets qui occupent nos marges et nous provoquent en faisant surgir l’irrationnel et une autre façon d’être au monde. Ils nous invitent à nous arrêter, marquer une pause et nous interroger sur le sens des choses. Cette course effrénée n’est-elle pas une fuite en avant ? Qu’est-ce que la normalité ? Qu’est-ce qu’une ville ? Et si l’isolement était un luxe comme le suggérait l’artiste dans le titre d’une de ses œuvres ? Et si la vraie vie était ailleurs ?
Mark Jenkins est né en 1970 à Fairfax, il vit et travaille à Washington D.C. Ses œuvres ont été présentées dans le monde entier : États-Unis, Brésil, France, Espagne, Italie, Irlande, Suède, Russie, Corée du Sud, Serbie, Japon. Son travail a été exposé au sein d’institutions muséales comme la Kunsthalle Wien (Autriche), le Perm Museum of Contemporary Art (Russie), le Centre Pompidou (France) ou le Beirut Art Center (Liban).